C’est entendu, les Symphonies de Beethoven sont devenues juste avant celles de Schubert l’enjeu premier des relectures historiquement informées, depuis Gardiner, Hogwood, Harnoncourt, Brüggen, leur instrumentaire d’époque leur a été rendu, côté texte l’édition de Jonathan Del Mar a remis les choses d’aplomb … des « progrès » qui ne m’ont jamais empêché de revenir inlassablement à Schuricht, Furtwängler, Böhm, Barshaï, Toscanini, Leibowitz ou Wyn Morris.

Arrivant dans ce contexte, et quasiment dans le sillage de l’intégrale de Paavo Järvi avec la Deutsche Kammerphilharmonie de Brême, le coffret aujourd’hui édité par Tacet risquait de passer inaperçu. Cela serait une injustice car la prise de son si vive, si présente est probablement la meilleure dont le cycle ait profité à ce jour. Mais il y a plus.

Wojciech Rajski et ses musiciens du Polish Chamber Philharmonic Orchestra abordent le cycle avec une volonté de l’unifier assez inédite. Tout Beethoven, sa furia, son invention, ses prospectives, se trouve incarné dès la Première Symphonie, cette langue si puissante ne fait ensuite que s’enrichir, croître, fabuleux organisme vivant qui éclatera littéralement dans une Neuvième Symphonie-Monde d’une puissance et d’un élan irrésistibles.

Secret de cet art altier, impérieux, si beethovénien ? Des tempos cravachés, alla breve—écoutez seulement la Marche funebre de l’Héroïque !—qui n’oublient pourtant jamais de chanter. Mais aussi un art de l’attaque que les formations symphoniques ont pour la plupart perdu, une prééminence des rythmes pas entendue depuis Toscanini. Et cette clarté partout qui emporte le discours, entraîne les phrasés, fait Beethoven le plus ardent héritier des Lumières.

Enregistrées dans la limpide acoustique naturelle de l’Église Stella Maris de Sopot, et captées avec une finesse de détails et une présence dynamique clouantes, ces symphonies sonnent haut et fort un renouveau de l’interprétation beethovenienne. Espérons que les Ouvertures suivront.

Jean-Charles Hoffelé
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